Il y a autant de gens qui aspirent à la stabilité que de gens qui aspirent à l’instabilité. Si la situation se résumait à la théorie des ensembles, ça serait mathématiquement faisable de former un couple en fonction de ses aspirations. C’est loin d’être le cas puisque les gens changent d’aspirations en fonction des périodes de leur vie. Plus compliqué encore, la société leur donnant maintenant le choix, beaucoup oscillent entre les deux. Choisir entre les atouts de la stabilité et celles de la liberté n’est pas toujours évident lorsqu’on vit au sein d’une fourmilière prônant l’individualité. Dans ce cas, la séduction devient une arme à plusieurs tranchants et les gens qui savent la manier, consciemment ou inconsciemment, jouent avec d’autres personnes afin d’installer une relation ambiguë n’excluant et n’affirmant aucune des deux possibilités. On retrouve des exemples de ce comportement dans la réalité ou en lisant des interventions sur des forums dédiés. Des « Il m’a dit qu’il m’aimait mais que je ne suis pas la femme de sa vie », des propositions de relation sans engagement, des gens qui rompent puis proposent une relation basée essentiellement sur la sexualité. Dans ce dernier cas, on aurait tendance à se dire que la raison est uniquement de pouvoir se satisfaire sexuellement et facilement. Mais il faut regarder au-delà et bien comprendre que la notion de familiarité a son importance aussi. Avec un ex, ou une ex, avec qui on a vécu une histoire « normale », pas besoin de redémarrer de zéro, cela permet d’être plus soi-même qu’avec quelqu’un de tout neuf. De plus, si l’autre personne accepte ce genre de situation c’est qu’elle éprouve toujours de l’attirance. Elle offre une part de stabilité parce qu’elle rassure sur le fait d’être apprécié pour soi-même. Les dessous de cette attirance sont en fait loin d’être aussi simplistes.
Il y a encore beaucoup d’autres exemples de comportements ou de déclarations totalement en ambivalence. Dans ce genre de contexte, la séduction devient un jeu de rôles où plus personne n’est lui-même. La spontanéité est tuée, la communication devient un champ de mines où chacun fait extrêmement attention à ce qu’il dit afin de ne pas faire jaillir des non-dits et de faux espoirs, les affirmations deviennent des murs infranchissables.

D’innombrables personnes recherchent quelqu’un de pétillant, qui les étonne, les séduit, les divertit, qui leur fasse oublier la réalité du quotidien, mais dès qu’un être les attirent, une majorité grandissante s’empresse de le menotter et de le bâillonner. Ils tuent dans l’œuf ce qui pourrait les obliger à faire un choix. Ironique, si on considère que leur liberté est donc de ne pas avoir le choix. Pour eux, le couple c’est avant tout quand ils veulent et quand ils ont besoin. Le partenaire s'assimile à un self service, on le pille à l’envi et avec bonne conscience en se disant que si il l’accepte c’est que ça lui convient aussi. C’est d’autant plus aisé de nos jours que le mot respect dans les relations hommes/femmes devient, le plus souvent, un terme creux se résumant à un « je ne le/la prends pas pour un(e) con(ne) ». Or, respecter quelqu’un, c’est avoir de la considération pour son avis, ses sentiments et sa personnalité.

Pour ne pas être seul, il faut être à deux. Les amis et les membres de la famille ne peuvent remplacer ce qu’un couple apporte, sans compter que les modes de vie actuel ont tendance à isoler les individus. [suite]

Mais il ne suffit même pas de vouloir pour pouvoir. Il ne suffit pas d’être conscient de ce que la vie de couple apporte pour être en mesure d’en construire un à l’épreuve du temps. La vie de couple c’est une pièce de théâtre composée d’une multitude d’actes, au grè desquels nous passons d’un rôle à l’autre. C’est un ballet que l’on joue à deux en fonction des humeurs, des attentes et de deux personnalités. C’est aussi un exercice d’improvisation, chacune de nos réactions importantes se fera en fonction de l’autre, sachant que la passivité peut avoir autant de conséquence que les actes ou les mots. Mais la vie de couple c’est surtout une bulle où on est soi-même. On est sensé être aimé pour nous-même et pour qu’il y ait longévité, il faut aimer l’autre pour lui-même aussi. Une alchimie délicate à mettre en place, car contrairement à la séduction, le gage de réussite c’est que sa durée de vie ne s’étale pas de quelques jours à quelques mois. L’amour n’est pas quelque chose qui fait battre le cœur, qui met le feu aux veines et qui donne l’impression d’avoir les os qui se liquéfient. C’est une somme de sentiments et d’émotions qui flirtent avec la sérénité et le bien-être, deux concepts agréables mais qui peuvent se transformer insidieusement en ennui si on n’y prend pas garde. L’amour partagé on le vit sans question pour soi-même ou pour l’autre, quand on commence à s’en poser c’est qu’il est souvent déjà trop tard. La passion se nourrit de doutes, de manques et questions. Même si cette passion est programmée comme très brève, elle se nourrira des mêmes ingrédients : « j’ai un plan fun pour ce soir, comment sera-t-elle ? Va-t-elle me plaire ? Est-ce qu’elle voudra bien faire tel truc ? ». Où se situe la séduction entre l’amour et la passion ? Si on revient au parallèle avec les comportements des espèces animales, elle est utilisée avant l’a[c]couplement et non après.

Est-il possible alors de faire perdurer un mélange d’amour et de séduction ? De continuer à être soi-même tout en restant attentif aux ressentis, aux besoins et aux envies de l’autre ? Autrefois un couple tenait parce que c’était comme ça et pas autrement. Aujourd’hui, l’obligation d’allier toutes les composantes nécessaires pour arriver au même résultat, constitue un but qui semble presque impossible à atteindre si l’on se réfère aux chiffres concernant les divorces et les séparations. [Suite du sujet]

 
 

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